Tôzai !...

Avant ou pendant ? Tôzai ! Le cri est lancé. Dans ses résonances, apparaissent les danses d'avant. Avant maintenant, avant le dévoilement. Ce moment qui est attente (du spectateur) avant de voir, préparation (du danseur) avant de faire. Dans cet instant qui s'efface pour laisser apparaître, il y a alors frémissements, glissements et bonds ; patience et excitation. Avant le lever du lourd rideau feutré. Devant lui et dans ses plis, les corps déploient et déroulent des danses qui ne se voient pas, pas encore ou plus. Pantins cocasses et apparitions surnaturelles se succèdent en soli, mèlant aux gestuelles venues d'un temps oublié ou d'un continent éloigné, la nostalgie et l'imaginaire. Dans la lumière en clair-obscur, les danseurs émergent des pliures, s'éveillent et s'agitent. Tout commence.

Fascinée par le Japon, Emmanuelle Huynh fusionne les pas de Joséphine Baker et des danses jazz afro-américaines aux figures populaires du pays du soleil levant, des mangas au Bunraku. Tôzai ! est justement l'appel lancé par l'accessoiriste avant les représentations de cet art théâtral ancestral. Il signifie littéralement d'est en ouest, comme un rideau qui s'ouvrirait du Japon à notre Europe. Émue par la ritualisation de ce commencement, souvent absente en Occident où le début d'un spectacle est signifié presque exclusivement par un noir bref, elle crée Tôzai !... autour de cette notion d'avant les choses : "comme si ce spectacle, et le théâtre dans son ensemble, étaient une préparation à vivre". Avec Múa, sa première pièce il y a 18 ans, la chorégraphe s'intéressait déjà à l'avant de son histoire, le Vièt-Nam. Aujourd'hui, elle poursuit son cheminement, toujours vers l'avant.